Lettre ouverte au premier ministre Justin Trudeau

Cher monsieur le premier ministre, 

Soutien international aux Ouïghours (SIO) invite le gouvernement canadien d’agir de manière concrète et de mettre en œuvreles recommandations formulées par les experts et survivants lors des audiences du Sous-comité des droits internationaux de la personne du Comité permanent des affaires étrangères et du développement international (SDIR) du 20 et 21 juillet 2020. 

Durant des décennies, les Ouïghours et autres peuples turcs du Turkistan oriental sont constamment victimes de discrimination, de répression et de persécution systématiques par le gouvernement Chinois depuis qu’il a pris possession duTurkistan oriental en 1949. La mise en place des camps de concentration, où près de trois millions d’Ouïghours sont détenus depuis 2016, est l’une des violations des droits de la personne les plus flagrantes et silencieuses. De nombreux CanadiensOuïghours ont perdu des membres de leur famille et ne savent toujours pas ce qui est arrivé à leurs proches. Sur le plan individuel, en ce qui concerne le Canada, la détention arbitraire par les autorités Chinoises du citoyen canadien d’origine Ouïghoure Huseyin Celil, depuis 2006, démontre le mépris de Beijing pour les droits de la personne et les lois internationales.

Comme évoqués lors des réunions du SDIR, les multiples horribles violations des droits de la personne au Turkistan oriental sont incontestables et requièrent une action urgente de la part du gouvernement Canadien. Les camps de concentration, le travail forcé, la séparation des familles et d’enfants, l’avortement et la stérilisation forcés des femmes, le prélèvement illégal d’organes, la surveillance gouvernementale sans précédent et la destruction des cimetières et sites religieux sont nonseulement des formes de répression, mais dépassent également le seuil du génocide. Ces crimes contre l’humanité par gouvernement Chinois sont motivés par des désirs d'assimilation, de destruction, et de contrôle des Ouïghours et de leurpatrie.

Par le passé, différentes réunions et conférences telles que les réunions du SDIR en 2018, entre autres, ont abordé la crisehumanitaire Ouïghoure. Des preuves ont été fournies, des témoignages de survivants ont été entendus et des recommandations d’experts et de survivants ont été faites. Cependant, suite à cela, peu de dialogues ont été entamés par le gouvernement canadien en ce qui concerne les Ouïghours. Aucune action concrète n’a été entreprise jusqu’à aujourd’hui.

Ce qui arrive aux Ouïghours au Turkistan oriental concorde avec la définition de génocide donnée par la Convention des Nations Unies et le Statut de Rome de la Cour pénale internationale. Le Canada, en tant que signataire, a la responsabilité d’agir au mieux de sa capacité afin de prévenir et de punir les responsables de génocide Ouïghour.

Le Canada a la responsabilité d’agir. Nous vous demandons, monsieur le premier ministre, de veiller à ce que les témoignages des experts et des survivants, ainsi que leurs recommandations n’aient pas été recueillis en vain. Si la situation est ignorée, elle ne fera qu’empirer comme nous l’avons constatée depuis la réunion du SDIR en 2018.

Recommandations

ISU recommande ce qui suit. Certaines de ces recommandations ont été mentionnées lors des audiences du SDIR en 2020 par des experts et des survivants afin d’aider les Ouïghours. (Pour le besoin de la cause, nous les généralisons comme « Ouïghours », mais cela inclut également les autres peuples turcs du Turkistan oriental): 

1. Offrir l’asile aux réfugiés Ouïghours et accorder le statut de réfugié aux apatrides. 

2. Prévenir et punir les autorités Chinoises harcèlant les Ouïghours au Canada. 

3. Interdire l’importation de biens produits par le travail forcé en tout ou en partie et présenter 

un projet de loi similaire au U.S Bill S2211 ou adopter une loi de due diligence comme la France. En plus de cela, maintenir et mettre à jour une liste de surveillance des entreprises, en particulier des entreprises Chinoises connues qui ont recours au travail forcé. 

4. Appliquer la loi Magnitski et élargir sa liste de sanctions afin de cibler et sanctionner les 

dirigeants et fonctionnaires Chinois ainsi que les architectes des centres et systèmes de détention. 

5. Sanctionner les entreprises profitant des violations de droits humains et contrôler 

l'exportation de technologies susceptibles d'être utilisées pour la surveillance de masse au Turkestan oriental. 

6. Reconnaître et déterminer légalement la crise humanitaire Ouïghoure comme un génocide et agir selon la Responsabilité de protéger. 

7. Nommer un envoyé spécial pour libérer Huseyin Celil. 

8. Prioriser les droits de l’homme dans toutes interactions avec la Chine. 

9. Fonder et maintenir des relations multilatérales avec des alliés démocratiques. Des sanctions coordonnées peuvent avoir un impact plus important sur la Chine. Nous recommandons également au Canada de travailler avec des organisations internationales telles que l'ONU pour mener, sur terrain, des enquêtes indépendantes. 

10. Demander la publication d’un rapport annuel par le Comité des droits de l’homme pour évaluer la situation des droits de la personne des Ouïghours. 

11. Fournir des fonds aux individus et aux organisations qui font des recherches et exposent la crise humanitaire Ouïghoure à la communauté internationale. 

12. Fournir des fonds et des ressources à des groupes à but non lucratif pour protéger et préserver la langue, la culture et les traditions Ouïghoures.

Respectueusement soumis,

Bakhtiar Semseddin

Président de Soutien international aux Ouïghours